L’incident de Mudken

Tout se passa comme dans un brouillard. On aurait dit qu’Hugo Pratt lui-même avait préparé la conquête de la Mandchourie par le Japon. Tout commence le 19 septembre 1931 par l’incident de Mudken en Mandchourie. Ce soir là des explosions détruisent une partie importante du chemin de fer de Mandchourie du Sud dans la région chinoise de Mandchourie. C’est une voie commerciale importante, et tout de suite les japonais prennent prétexte de la situation pour cerner la garnison chinoise toute proche et ils attaquent les troupes en cantonnement.

Le gouvernement de Tchang Kaï-chek avait déjà décidé de refuser l’affrontement avec les troupes japonaises pourtant numériquement inférieures. A Beidaying, les japonais ne rencontrent aucune résistance. Ils avancent, et désormais ils contrôlent l’ensemble de la garnison et les villes principales de Mandchourie du Sud : Shenyang, Changchun, Dandong, et les environs. En quelques jours, c’est l’ensemble de la Mandchourie qui tombe sous l’influence du Japon.

La création du Mandchoukouo le 18 février 1932

L’armée japonaise décida de créer un État fantoche, le Mandchoukouo. Cet État ne fut reconnu que par l’Italie et l’Allemagne. L’ensemble des autres nations considéraient que cette province appartenait légitimement à la Chine. La doctrine Stimson des Etats-Unis à ce sujet est très claire. En 1932 est installé Puyi, le dernier Empereur de la dynastie Qing. Il est à la tête de l’Empire mandchou.

L’incapacité de la Société des nations de résoudre le conflit

Alors que l’Europe sort difficilement de la première guerre mondiale, le Traité de Versailles signé le 28 juin 1919 prévoit la création de la Société des nations dans sa première partie. Celle-ci est considérée comme la première forme réellement organisée de gouvernance mondiale pour gérer les conflits liés à la sécurité collective. Pourtant, elle est dans l’incapacité d’apporter une solution au conflit entre le Japon et la Chine. Le japon était membre permanent du Conseil de la Société des nations, qui est le prédécesseur du Conseil de sécurité de l’ONU, ce qui décrédibilisait complètement l’institution nouvellement mise en place. Le rapport Lyton déclara que le Japon devait restituer la Mandchourie à la Chine. Avant même le déroulement du vote par l’Assemblée de la Société des nations, le Japon avait annoncé son intention de se retirer de l’organisation.

Les sanctions économiques étaient inutiles puisque le Japon continua de commercer avec les États-Unis. La situation se reproduisit peu de temps après avec l’invasion italienne en Abyssinie en octobre 1935, précipitant la fin de la société des nations.

La fin de Puyi sous la contrainte de l’armée rouge

Suite aux bombardements atomiques du 9 août 1945, l’Union soviétique envahit le pays. L’armée du Mandchoukouo est écrasée par l’Armée rouge, ainsi que par l’armée japonaise du Guandong. Les chinois s’installent à Harbin pour asseoir leur contrôle sur la zone. Puyi et ses ministres furent arrêtés par les soviétiques. On entendit plus jamais parler d’eux

Affaire du vapeur « Wimbledon »

L’affaire dit du « Vapeur de Wimbledon » [(R.A.C.P.J.I, 1er janvier 1922 – 15 juin 1925), Série E, N°1, pp. 159-163] a été l’objet d’un arrêt de la Cour Permanente de Justice Internationale, le 17 août 1923. C’est l’une des affaires les plus connues, et les moins commentées par la doctrine internationaliste.

Une société de fret française « Les affréteurs réunis » avait chargé dans le port de Salonique, au printemps 1921, des munitions et du matériel militaire à destination de Dantzig en Pologne, dans un bateau vapeur anglais – le Wimbledon. Lors de son voyage, le bateau vapeur se vit interdire l’accès au canal de Kiel par son directeur. Celui-ci opposait au capitaine du vapeur les ordonnances signées par l’Allemagne, et promulguées lors de la guerre russo-polonaise. A titre subsidiaire, il invoquait les ordre hiérarchiques qu’il avait reçus. L’Ambassadeur français à Berlin demanda sans l’obtenir la levée de cette interdiction, et d’autoriser le bateau vapeur à traverser le canal. Il se fondait sur le traité de Versailles. Il se vit à son tour opposer un refus. Le gouvernement allemand soutenait que les ordonnances sur la neutralité des 25 et 30 juillet 1920 interdisait le transit de tels chargements vers la Pologne et la Russie, et que le traité de Versailles sur la paix ne s’y opposait pas.

La société française d’affrètement ordonna au capitaine du Wimbledon de poursuivre sa route par les tracés danois. Ainsi, le vapeur passa finalement par Skagen pour arriver à Dantzig. Le navire a subi un arrêt à quai – un stationnement – de onze jours, et un déroutement de deux jours.

Néanmoins, cet incident devait connaître un développement diplomatique. Des négociations se sont déroulées entre la conférence des Ambassadeurs et le gouvernement allemand mettant en cause des points de vues opposés concernant la neutralité de l’Allemagne. Les vainqueurs de la première guerre mondiale se virent confrontés à la position de l’Allemagne qui suggéra d’elle-même aux ex-alliés la saisine de la CPJI, organe nouvellement mise en place par la Société des nations pour résoudre l’interprétation à donner au traité de Versailles, et la portée de la neutralité de l’Allemagne.

La requête des puissances à l’encontre de l’Allemagne demande réparation à hauteur de 175,000 francs, et des intérêts de 6%/an. La requête fut transmise au gouvernement allemand, aux membres de la SDN, et aux signataires du traité de Versailles. Le gouvernement polonais, sur la base de l’article 63 du Statut, déposa une requête aux fins d’intervention.

I. Intérêt à agir

La CPJI a reconnu la requête recevable, même si les demandeurs n’avaient pas un intérêt pécuniaire évident à l’exécution des clauses du traité de Versailles.

II. Fond

La CPJI a procédé à une analyse des clauses, et conclut à l’absence d’équivoque. Le canal de Kiel a cessé d’être une voie navigable intérieure.

Sur la neutralité de l’Allemagne, la réserve de l’article 380 du traité de Versailles a pour conséquence que le passage est applicable aussi dans le cas de la neutralité de l’Allemagne. La clause qui est visée par la CPJI impose une importante limitation de la souveraineté de l’Allemagne sur le canal de Kiel. La Cour considère qu’il faut donner une interprétation restrictive à la clause du traité de Versailles, mais une telle interprétation ne doit tout de même pas faire dire le contraire de ce que la clause énonce.

La formation des sources du droit international est problématique. D’un côté, l’ensemble des mécanismes au moyen desquels les règles se constituent, et de l’autre ces règles dans leur état présent. Un traité résultant d’un ensemble de procédures conventionnelles contient des normes conventionnelles dont l’autorité apparaît distincte du mécanisme lui-même. C’est en ce sens que la CPIJ a pu constater que la conclusion d’un traité quelconque par un État ne constituait pas « un abandon de souveraineté » parce que « la faculté de contracter des engagements internationaux est précisément un attribut de la souveraineté de l’État ».

Il en découle que la CPIJ reconnaît à l’Allemagne le droit de déclarer sa neutralité dans la guerre russo-polonaise, mais à condition de respecter et de laisser intactes ses obligations contractuelles, en l’espèce celles qu’elle avait souscrites à Versailles, et que ces obligations imposaient à l’Allemagne de laisser le Wimbledon emprunter le canal de Kiel librement.

L’Allemagne est donc condamnée en réparation.

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