Le cimetière marin, Paul Valéry (1920)

C’est récemment lors du décès de l’un de mon voisin du dessus, que j’ai repensé à Paul Valéry. Depuis que je suis tout petit, mon grand père m’avait donné la passion de Paul Valéry. Lors de la cérémonie religieuse du décès de mon voisin, des vers du cimetière marin ont été récités, à l’image de la cérémonie de mon propre grand père. Nous avons oublié quel impact Paul Valéry a pu avoir pour la génération de nos grands parents qui aujourd’hui ont entre 85 et 95 ans. Je me souviens qu’en 2009 lors de son décès, mon cousin et moi avions récité Le Cimetière marin devant la baie de Trébeurden dans les Côtes d’Armor. Si les rivages du Cimetière marin de Paul Valéry sont ceux de Sète, les vers du penseur résonnaient formidablement sur nos rivages bretons.

Des amis bretons avaient trouvés une embarcation, et les hommes de la famille partirent en mer disperser les cendres du vieil homme. La mer était agitée, le ciel d’un gris très foncé, le bruit du bateau de pêcheur, la houle de la mer, et là, plus un bruit. Les vers qui furent récités par coeur de la bouche de deux enfants rendirent au monde son silence.

En voyant, l’hommage rendu à mon voisin, je n’ai pu m’empêcher de repenser à mon propre grand père, et de me réciter une fois de plus le cimetière marin : « Et quelle paix semble se concevoir, quand sur l’abîme un soleil se repose ».

Il serait long, très long de revenir sur la densité du poème, sur Paul Valéry, et sur son génie immense. Aujourd’hui, c’est le recueillement.

images

Ce toit tranquille, où marchent des colombes,
Entre les pins palpite, entre les tombes;
Midi le juste y compose de feux
La mer, la mer, toujours recommencée
O récompense après une pensée
Qu’un long regard sur le calme des dieux!

Quel pur travail de fins éclairs consume
Maint diamant d’imperceptible écume,
Et quelle paix semble se concevoir!
Quand sur l’abîme un soleil se repose,
Ouvrages purs d’une éternelle cause,
Le temps scintille et le songe est savoir.